Jean Lassalle, un politique qui désespére de la politique ?
Un geste d’espoir ou un symptôme de désillusion ?
Jean Lassalle définit son geste comme porteur d’un « message d’espoir ». Sur un plan purement philosophique, nous pourrions effectivement le concevoir ainsi. Le recours à des actes forts pour dénoncer des injustices est une constante dans l’histoire de l’engagement humain.
Rappelons-nous, en son temps, la célèbre phrase du poète et écrivain Georges Brassens :
« Mourir pour des idées, l’idée est excellente,
Moi j’ai failli mourir de ne l’avoir pas eue. »
Cette citation, teintée d’ironie, met en lumière l’ambivalence de l’engagement politique : entre l’idéalisme nécessaire et le risque de sombrer dans l’absurde ou le désespoir.
Une grève de la faim : symbole d’un malaise profond
Sur un plan plus politique, ce geste est indéniablement un symbole, un signe fort. Mais il est avant tout le révélateur d’un malaise grave au sein de notre société. En entamant une grève de la faim pendant plusieurs semaines, ce député UDF a voulu manifester son refus face à la précarité économique et au désespoir social qui frappaient les 150 habitants de sa commune des Pyrénées-Atlantiques.
L’entreprise qui employait ces hommes et ces femmes était menacée de fermeture suite à une délocalisation certes « larvée », comme le précise le député, mais qui, selon lui, aboutirait à long terme aux mêmes résultats : la perte des emplois et la désagrégation du tissu social local.
La faillite du politique ?
Si nous ne devions retenir qu’une chose de cette histoire – dont la fin a connu un dénouement heureux, ce dont nous nous réjouissons – c’est qu’elle symbolise pour des milliers de Français la faillite du politique. En effet, on peut se poser la question : s’agit-il du dernier échelon sur l’échelle des actions politiques ?
Bien sûr que non. Mais dans ce cas, ce geste n’annihile-t-il pas la portée de l’action politique traditionnelle ? Lorsqu’un élu de la République, censé défendre les intérêts de ses concitoyens par les voies institutionnelles, se voit contraint d’en venir à de telles extrémités, que cela dit-il de la capacité des institutions à répondre aux problèmes concrets des citoyens ?
Une nouvelle forme d’action politique ?
Cela signifie-t-il que la possibilité de changement devra désormais passer par ce mode de revendication extrême ? Ce type d’acte doit-il devenir un mode général d’action, et non plus un acte isolé ? Ces questions sont légitimes et inquiétantes à la fois.
Cette page de l’histoire politique française nous interpelle, nous, simples citoyens. Elle nous oblige à réfléchir sur l’état de notre démocratie et sur la capacité des institutions à être à la hauteur des enjeux contemporains.
Que pouvons-nous encore espérer ?
Autrement dit, que pouvons-nous encore aujourd’hui espérer ? Ce geste de Jean Lassalle, au-delà de sa résonance locale, pose une question universelle sur le rôle de l’engagement politique et sur les limites des moyens d’action dans un système où les citoyens se sentent de plus en plus déconnectés des décideurs.
L’espoir réside peut-être dans la capacité à repenser l’action politique, à la réconcilier avec les réalités du terrain, et à redonner du sens aux engagements. Mais pour cela, il faut que les gestes de désespoir cessent d’être les derniers recours et redeviennent des exceptions. Car une démocratie forte se mesure à sa capacité à résoudre les conflits par le dialogue et la concertation, non par la souffrance et la mise en danger de soi.